samedi 23 novembre 2013

Comment créer un DCP et l'utiliser avec profit pour diffuser vos œuvres

Une question récurrente ces jours-ci (en phase avec nos précédentes publications) : comment créer un DCP ou Digital Cinema Package, et comment l'exporter et ensuite l'utiliser dans un projecteur numérique de D-Cinéma. Il existe bien sûr différentes solutions, dont certaines en open source, d'autres très "pro" qui coûtent très cher ou assez cher, et d'autres encore sous forme de plug-in, pour Adobe Premiere Pro ou Final Cut Pro, par exemple.



Mais d'abord, qu'est-ce qu'un DCP ?
Q. : Qu'est-ce qu'un Digital Cinema Package  (DCP) ?
R.: Un DCP est l'équivalent numérique d'une copie 35mm en argentique. C'est l'ensemble des fichiers sauvegardés sur un disque dur, et fournis aux exploitants de salles de cinéma. Les fichiers sont compressés à partir d'un master appelé Digital Cinema Distribution Master (DCDM), et comprennent le film (image, son, métadonnées, etc.) et le cryptage le protégeant d'un éventuel piratage. Un DCP est généralement composé de fichiers MXF (Material Exchange Format) et XML, et les images sont encodées en JPEG-2000. Le DCP est aujourd'hui un standard, ce qui simplifie sa diffusion et son utilisation.

Q.: Pourquoi faire un DCP plutôt qu'une copie 35mm classique ?
R.: Il faut déjà se rendre compte que la diffusion de la projection de films en numérique a pris une importance telle, ces dernières années, qu'il n'est plus possible, pour un exploitant, de prétendre obtenir n'importe quelle copie des films qu'il compte projeter, en 35mm comme autrefois. Pour se rendre compte de l'évolution du cinéma vers le numérique, quelques chiffres (empruntés à David Bordwell, Pandora's Digital Box, p. 9 et suivantes) : en décembre 2000, il y avait environ 164000 écrans de par le monde, et seulement une trentaine de projecteurs numériques. Cinq ans plus tard, ils étaient 848. Fin 2010, 36103 écrans étaient réservés à la projection en numérique, soit environ 30 pour cent du total. Fin 2011, 80 pour cent des films distribués en Grande Bretagne l'étaient en numérique, et en Belgique les deux principaux exploitants, Kinepolis et UGC, sont passés au numérique dans l'ensemble de leurs salles. En Norvège, toutes les salles sont passées à la projection en numérique cette année-là, surtout en raison de subventions gouvernementales qui ont accéléré la transition. Au jour d'aujourd'hui, certaines majors (Twentieth Century Fox, par exemple) ont tout simplement cessé de produire des copies 35mm et bon nombre de salles n'ont tout simplement plus de projecteurs 35mm à leur disposition !
Une autre raison tient au facteur prix : pour obtenir une copie 35mm d'un film tourné en numérique et post-produit sur les systèmes de montage actuels, il faudra effectuer un "filmout", c'est à dire le processus qui consiste à convertir des fichiers numériques en film. Le coût pour un long métrage est évalué à 40 K$ environ (chiffre fourni par dcpinfo.com).
Bien évidemment il y a aussi le facteur qualité, puisqu'un fichier ne sera pas dégradé par de multiples passages dans le projecteur, contrairement à la copie film. Après, bien sûr il y a le coût du DCP.




Q.: Combien ça coûte ?
R.: Là on s'aperçoit qu'il faut aller à la pêche aux infos et que ce n'est pas toujours évident de démêler le lard du cochon. Une source qui me semble assez fiable : une boite spécialisée de Bruxelles, Charbon Studio, qui a la correction de publier ses tarifs sur son site Internet. Bon, ça reste assez cher, donc si vous avez un court métrage ou que vous avez réalisé un doc avec des copains, il vaut sans doute mieux se rabattre sur du DIY, avec tous les aléas que cela comporte...
Il faudra vérifier toutefois que le prix de la prestation inclut :
1. Le Master, avec tous les fichiers (audio, vidéo, sous-titres, etc.)
2. Le QC (Quality Check) après vérification que tous les problèmes éventuels ont bien été réglés (drop out, synchro, gamma, colorimétrie, etc.)
3. Le transfert du DCP vers une unité de sauvegarde, qui peut être un disque dur acheté dans n'importe quel magasin ou bien une unité professionnelle disposant d'un système de transport sécurisé tel que le DX115, appelé CRU.

Q.: Quelles normes pour le D-Cinéma
R.: Il existe des règles qui varient assez peu selon les pays (la normalisation fonctionne assez bien). L'Academy of Motion Picture Arts and Sciences a adopté les spécifications suivantes pour les DCP :
Video:                24.00 frames per second
Compression:     JPEG2000
Color Space:       XYZ
Video Format:     2K - 2048x1080 container size (1920x1080, 1998x1080, 2048x858 and other image sizes are acceptable)
Audio Format:     24-bit, 48 kHz uncompressed
                            Minimum 3 channels (Left,Right,Center) or 5.1 (L,R,C,LFE,LS,RS)
Audio Channel
Mapping:            1:Left   2:Right   3:Center   4:Subwoofer  5:Left Surround   6:Right Surround
Encryption:         Unencrypted material only

De son côté, la France dispose d'une norme AFNOR NF S 27-100 pour "salle de projection électronique de type cinéma numérique" dont les spécifications techniques sont les suivantes :



 Q.: Dans ce cas, comment puis-je faire un DCP ?
R. : Plusieurs solutions sont disponibles. Il existe des solutions professionnelles, comme celle proposée par Rovi, dénommée Total Code Studio, ou encore easyDCP, qui est intégré aujourd'hui à la toute dernière version de Resolve, la suite d'étalonnage de Blackmagic Design.On pourra aussi s'intéresser à des solutions open source, comme OpenDCP ou, plus facile, DVD-o-matic qui fonctionne plutôt bien, semble-t-il.
Le seul problème (mais il est de taille) avec toutes ces solutions, c'est que le DCP ainsi crée ne peut être réllement testé et évalué que sur grand écran, avec un projecteur D-cinéma. Les DCP utilisent un espace colorimétrique différent de celui intégré à votre moniteur informatique ou vidéo, ce qui signifie qu'il n'est  possible, sur une station de travail, que d'émuler le look spécifique de la projection en salle.

Q.: Où peut-on trouver les spécifications du DCP ?
R.: Dans les documents suivants, SMPTE 428-1-2006 D-Cinema, ISO/IEC 15444-1, SMPTE 428-2-2006 D-Cinema, SMPTE  428-3-2006 D-Cinema


Au final, pour permettre la réalisation du DCP dans une des solutions proposées, il vous faudra le film dans un fichier HD Quicktime ou AVI, compressé au format JPEG-2000, avec les spécifications suivantes :

Video : 24, 25, 30, 48, 50, and 60 fps @ 2K
            24, 25, and 30 fps @ 4K
            24 and 48 fps @ 2K stereoscopique

Format : HDTV 1920x1080 ou 3840x2160 pour du 16:9 (~1,78:1)
              Flat 1998x1080 ou 3996x2160 (~1,85:1)
              Scope 2048x858 ou 4096x2160 (~2,39:1)

Bit rate max. : 250 Mbit/s.
Espace colorimétrique : XYZ
Résolution : 12 bits par pixel (soit 36 bits au total)

Fichier encodé en sortie DCP : H.264 ou Uncompressed

Audio : 3 canaux au minimum (Gauche, Droite et Centre) ou 5.1 (L,R,C,LFE,LS,RS) - intégré dans un fichier Quicktime ou bien fourni dans des fichiers mono 24bits/48kHz/96kHz, WAV ou AIFF

Mapping Audio : 1:Gauche, 2:Droite, 3:Centre, 4:Subwoofer, 5:Surround gauche, 6:Surround droite


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