9 février 2020 :
4K60fps et coloriage. Bon, bien évidemment tout le monde ne va pas apprécier... On peut s’interroger sur ces pratiques qui consistent à ajouter de la couleur à des bandes tournées en noir et blanc. Cependant, le nombre d’archives cinématographiques recyclées de la sorte ne cesse de croître à mesure que la puissance des systèmes numériques augmente. On peut refuser de telles pratiques car peu conformes avec l’idée que l’on se fait de l’intégrité d’une œuvre. Il devient difficile pourtant d’éviter une discussion autour de cette notion même d’œuvre cinématographique au contour et à la forme intangibles. La réalité du numérique a déjà posé la question de l’avenir de la salle de projection comme le lieu unique dans lequel se déroule le spectacle cinématographique. La question suivante est celle de la pérennité de l’œuvre,confrontée à la multiplication des possibilités de ses modes de consommation et, par la suite à sa banalisation. Il y aurait à mon sens deux attitudes possibles en face de ces transformations : l’une « passéiste », qui consisterait à tenter de défendre le cinéma dans sa forme et ses modes de consommation actuels, l’autre plus « dynamique » qui plaiderait plutôt pour une adaptation et une évolution jugées nécessaires. D’une manière ou d’une autre, on ne peut éviter de constater que les films de cinéma sont désormais autant et sans doute plus regardés sur un smartphone que dans une salle dédiée. On peut tracer ici une trajectoire qui irait de Benjamin à Warhol, mais on peut difficilement en déduire une conclusion concernant l’avenir de la forme classique du cinéma... Quel rapport avec la colorisation de ces films des débuts du cinématographe ? C'est toujours pareil : vous touchez à une "oeuvre" qui, dans tous les sens du terme devrait demeurer vierge de toute transformation ultérieure tant et si bien qu'on pourrait dire qu'à l'instar d'une gravure de Dürer ou d'un tableau de Rembrandt, ce qui a été fixé sur la pellicule l'a été pour l'éternité. Mais est-ce bien le cas ? sommes-nous absolument certains que les fresques murales de la grotte Chauvet, par exemple, sont visibles aujourd"hui telles qu'elles l'ont été au moment de leur création ? C'est à dire dans les mêmes conditions que pour ceux qui les ont peintes. Les transformations d'une émulsion dans le temps, le mouvement des particules magnétiques à la surface d'un disque magnétoptique ne nous garantissent pas de pouvoir regarder un film aujourdhui comme à l'époque où il fut tourné et ce sont les couleurs qui en sont d'abord affectées (un internaute, apparemment amateur de chemins de fer, remarque d'ailleurs sur YouTube que le rendu de la locomotive est erroné car, à l'époque, leur couleur était d'un vert clair qui n'a rien à voir avec la vidéo...) . Le processus de restauration des tableaux anciens procède lui-même à partir de l'état de nos connaissances et avec les outils dont disposent les restaurateurs aujourd'hui. Pour en revenir à la photographie et au cinéma, on sait que les films anciens dérivent vers le bleu, pour les Ektachrome ou vers le magenta pour Agfa. D'une manière générale on sait qu'un film Kodak a un rendu plus "chaud" qu'un Agfa. Le processus de restauration en tient compte, mais on reste dans l'analogie, c'est à dire qu'on estime qu'il y a 40 ou 50 ans le film aurait eu le rendu qu'on va tenter de restituer. On remarquera aussi que ces processus de restauration de films se font entièrement en numérique. Et qui dit numérique dit codage et quantification (sur 10 ou 12 bits, peut-ête 14 bits) et il reste une marge d'erreur possible due justement à la profondeur de quantification. Cette marge qui peut être encore, en dehors du résultat des approximations de la machine, celle du restaurateur lui-même. D'ailleurs, comment procède-t-on en étalonnage numérique aujourd'hui ? Malgré la précision des logiciels et la puissance de traitement des machines, le processus reste entièrement contrôlé par ceux qui ont en charge l'étalonnage ou la restauration du film : l'étalonneur lui-même, mais aussi le directeur de la photographie et le réalisateur (lorsque c'est possible). On est donc loin d'un processus uniforme d'où serait bannie toute subjectivité.
Une autre version de la vidéo, celle postée par le Huffington Post
11 février 2020 : Voici donc une tentative de plus pour tenter de retrouver les couleurs d’une
époque lointaine. Elle s’inscrit toutefois dans une tendance actuelle qui fait
que les producteurs, des cinéastes, cherchent par le biais de techniques
numériques à coloriser des archives cinématographiques. Bien évidemment, on peut s’interroger sur ces pratiques qui
consistent à ajouter de la couleur à des bandes tournées en noir et blanc.
Cependant, le nombre d’archives cinématographiques recyclées de la sorte ne
cesse de croître à mesure que la puissance des systèmes numériques augmente. On
peut refuser de telles pratiques car peu conformes avec l’idée que l’on se fait
de l’intégrité d’une œuvre. Il devient difficile pourtant d’éviter une
discussion autour de cette notion même d’œuvre cinématographique au contour et
à la forme intangibles. La réalité du numérique a déjà posé la question de
l’avenir de la salle de projection comme le lieu unique dans lequel se déroule
le spectacle cinématographique. La question suivante est celle de la pérennité
de l’œuvre, confrontée à la multiplication des possibilités de ses modes de
consommation et, par la suite à sa banalisation. Il y aurait à mon sens deux
attitudes possibles en face de ces transformations : l’une « passéiste », qui
consisterait à tenter de défendre le cinéma dans sa forme et ses modes de
consommation actuels, l’autre plus « dynamique » qui plaiderait plutôt pour une
adaptation et une évolution jugées nécessaires. D’une manière ou d’une autre,
on ne peut éviter de constater que les films de cinéma sont désormais autant et
sans doute plus regardés sur un smartphone que dans une salle dédiée. On peut
tracer ici une trajectoire qui irait de Benjamin à Warhol, mais on peut
difficilement en déduire une conclusion concernant l’avenir de la forme
classique du cinéma... Quel rapport avec la colorisation de ces films des
débuts du cinématographe ? C'est toujours pareil : vous touchez à une "œuvre"
qui, dans tous les sens du terme devrait demeurer vierge de toute
transformation ultérieure tant et si bien qu'on pourrait dire qu'à l'instar
d'une gravure de Dürer ou d'un tableau de Rembrandt, ce qui a été fixé
sur la pellicule l'a été pour l'éternité. Mais est-ce bien le cas ? Sommes-nous
absolument certains que les fresques murales de la grotte Chauvet, par exemple,
sont visibles aujourd’hui telles qu'elles l'ont été au moment de leur création
? C'est à dire avec les yeux de ceux qui les ont peintes. Les transformations
d'une émulsion dans le temps, le mouvement des particules magnétiques à la
surface d'un disque magnéto-optique ne nous garantissent pas de pouvoir
regarder un film aujourd’hui dans les mêmes conditions qu'à l'époque où il fut
tourné et les couleurs en sont affectée[1]s. Le
processus de restauration des tableaux anciens procède lui-même à partir de
l'état de nos connaissances et avec les outils dont disposent les restaurateurs
aujourd'hui. Pour en revenir à la photographie et au cinéma, on sait que les
films anciens dérivent vers le bleu, pour les Ektachrome ou vers le magenta pour
Agfa. Plus généralement, on sait qu'un film Kodak a un rendu plus
"chaud" qu'un Agfa. Le processus de restauration en tient compte,
mais on reste dans l'analogie, c'est à dire qu'on estime qu'il y a 40 ou 50 ans
le film aurait eu le rendu qu'on va tenter de restituer. On remarquera aussi
que ces processus de restauration de films se font entièrement en numérique. Et
qui dit numérique dit codage et quantification (sur 10 ou 12 bits, peut-ête 14
bits) et il reste une marge d'erreur possible due justement à la profondeur de
quantification. cette marge qui peut être encore, en dehors du résultat des
approximations de la machine, celle du restaurateur lui-même. D'ailleurs,
comment procède-t-on en étalonnage numérique aujourd'hui ? Malgré la précision
des logiciels et la puissance de traitement des machines, le processus reste
entièrement contrôlé par ceux qui ont en charge l'étalonnage ou la restauration
du film : l'étalonneur lui-même, mais aussi le directeur de la photographie et
le réalisateur (lorsque c'est possible). On est donc loin d'un processus
uniforme d'où serait bannie toute subjectivité.
[1] Un internaute, apparemment
amateur de chemins de fer, remarque d’ailleurs sur YouTube que le rendu de la
locomotive est erroné car, à l’époque, leur couleur était d’un vert clair ce
qui n’a rien à voir avec la vidéo…
a été fixé sur la pellicule l'a été pour l'éternité
RépondreSupprimerPourquoi le cinéma documentaire attirent les gens du https://dpstream.tube/ cinéma moderne?
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