dimanche 14 février 2016
dimanche 1 novembre 2015
La conservation des médias : un enjeu crucial pour les organisations culturelles
On sait qu'il s'agit là du cœur de métier de l'INA en France. 
Ailleurs, la question se pose avec tout autant d'acuité à l'heure où la 
dématérialisation des contenus pose la question de la pérennité des 
contenus multimédias.
Une série d'articles sur le site du MoMA
 vient faire le point sur cette question, avec une vidéo à l'appui, qui 
présente Binder, un outil logiciel pour la gestion de la conservation 
des données numériques.
Revenons
 au MoMA. Un problème particulier de conservation des médias concerne 
les collections vidéo du MoMA. Peter Oleksik a développé cette question 
dans un article intitulé Digitizing MoMA's Video Collection.
 Il décrit comment les conservateurs ont du se confronter à la 
multiplicité des formats vidéo existant dans la collection, ce qui leur 
demandait des connaissances techniques précises afin de réaliser la 
migration vers des supports numériques, dématérialisés (là aussi s'est 
posée la question du choix des formats de fichiers).
Les
 problèmes sont donc multiples, et pour bien saisir leur portée, il est 
possible de se référer à un exemple précis : celui du transfert d'une 
œuvre de Nancy Holt et Ricard Serra,  Boomerang (1974). Le 
"master" de ce travail était enregistré sur une bande 2 pouces 
Quadraplex, et après quelque temps, elle avait aussi été enregistrée sur
 bande 3/4 de pouce U-Matic, sur Betacam SP et dans un fichier vidéo. La
 question qui se pose c'est comment a été réalisé ce processus de 
migration ? Quels outils techniques ont été utilisés par les personnels 
en charge de ce travail ? Pour être précis, le transfert du Betacam SP 
vers un fichier vidéo avait été réalisé d'abord à travers un 
magnétoscope numérique Sony DVW-A500 comme lecteur, et une carte  
d'acquisition BlackMagic Decklink Studio. Dans la plupart des cas, les 
conservateurs disposent d'une information précise concernant cette 
chaine, ou bien ils peuvent effectuer des inférences à propos des 
dispositifs utilisés. Ils établiront ainsi une sorte d'historique des 
traitements effectués autour de cette œuvre.
L'information
 dans ce "flux de travail" (workflow) est enregistrée dans des formats 
le plus souvent propriétaires, ce qui ne facilite pas la tâche de ceux 
qui ne sont pas informaticiens. C'est là qu'intervient Binder, qui est 
une application qui facilite les relations entre différentes itérations.
 Ce système est utilisé pour enregistrer puis pour accéder aux 
différents processus dans un format open source standard. L'historique 
des processus ainsi réalisés est enregistré dans un fichier XML, ce qui 
permet de récupérer des tags descriptifs qui indiquent ce que chaque 
morceau de texte représente. Exemple : le numéro de série d'un 
magnétoscope DVW-A500 pourrait être encodé dans un tag appelé "numéro de
 série".
On
 comprend assez rapidement que la quantité de travail à effectuer pour 
classer de telles œuvres devient rapidement très importante. A ce jour, 
la musée dispose de plus de 1600 travaux réalisés en vidéo - une 
collection qui remonte en fait aux tous débuts de "l'art vidéo", et qui 
prend place dans ne collection de plus de 6000 vidéo. Le MoMA s'est très
 tôt illustré par son intérêt pour ces nouvelles technologies de 
l'époque. Trois ans seulement aprsè l'apparition du Portapak (le premier
 enregistreur vidéo postable), le MoMA projetait une œuvre de Nam June 
Paik, Lindsay Tape (1967) dans le cadre de l'exposition de 1968 intitulée The Machine as Seen at the End of the Mechanical Age,
 organisée par K. G. Pontus Hulten. La pièce était composée de deux 
magnétoscopes avec des bandes d'un demi pouce, éloignés de 3 mètres l'un
 de l'autre, avec une bande qui se dévidait d'un magnétoscope tout en 
étant rembobinée dans l'autre, et cela dans une boucle continue. Au bout
 d'une semaine de ce traitement, la bande (qui était en fait l'original 
d'un travail précédent de Paik) a du être arrêtée faute de quoi elle 
aurait probablement été perdue...
Photo de l'installation ci-dessous :
La
 vidéo est un médium aux caractéristiques inextricablement liées à 
celles d'une industrie dans laquelle les avancées technologiques sont 
très rapides et provoquent régulièrement des remises en question non 
seulement des équipements et des systèmes, mais aussi des questions 
relatives au travail, dans son essence même et dans sa finalité.
La
 transformation rapide et quasi incessante qu'ont connus les supports et
 les formats d'enregistrement ont ainsi conduit à passer successivement 
de la cassette VHS au DVD, puis maintenant directement à Netflix 
pourrait-on dire - c'est à dire plus exactement au streaming, ce qui 
pose bien sûr la question même de la pérennité des œuvres à travers des 
problématiques telles que celles relatives au droit d'auteur par 
exemple. Que vaut réellement un film qui peut être téléchargé des 
milliers de fois, faire l'objet d'une consommation instantanée, puis 
être relégué aux oubliettes dans un musée ou pire, dans la vidéothèque 
d'une société de production ou d'un distributeur anonyme ? que 
deviendront les films qui ne seront pas estampillés "œuvres d'art" 
susceptibles de faire partie du patrimoine et donc d'une sauvegarde dans
 des institutions culturelles ?
En
 France, c'est l'INA qui est le maitre d’œuvre principal de l'archivage 
des médias audiovisuels. Son rôle, cependant, va bien au-delà des 
problèmes de conservation des œuvres vidéo d'un musée, même aussi 
important que le MoMA.
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